La situation des familles, des enfants et des personnes âgées vulnérables dans les départements et régions d’outre-mer (Drom) : réalités sociales et politiques menées
La situation des familles, des enfants et des personnes âgées vulnérables dans les départements et régions d’outre-mer (Drom) : réalités sociales et politiques menées, dossier transversal du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), établit un constat sur la situation des familles, des enfants et des personnes âgées vulnérables dans les départements et régions d’outre-mer (Drom) et propose des pistes en vue d’améliorer cette situation.
Derrière des points communs qui les différencient de la métropole,
une grande diversité des territoires ultramarins
Les quatre Drom « historiques » (Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Martinique) et Mayotte, qui n’est devenu un département qu’en 2011, connaissent un certain nombre de réalités communes, qui les distinguent de la métropole :
- les caractéristiques socioéconomiques de la population de ces cinq territoires sont nettement plus défavorables que celles de la métropole, qu’il s’agisse des revenus, du taux de pauvreté monétaire, de l’emploi, du niveau d’éducation, de la santé et plus largement de l’ensemble des conditions de vie ; de ces différents points de vue, la situation de Mayotte apparaît particulièrement problématique ;
- la proportion de familles monoparentales est beaucoup plus élevée qu’en métropole, quel que soit le territoire ; la monoparentalité y est souvent une manière de faire famille comme une autre, et non une situation transitoire.
Au-delà de ces quelques points communs, il existe une grande diversité de situations entre ces cinq territoires, notamment en matière démographique :
- la Martinique et la Guadeloupe connaissant une décroissance démographique et une forte émigration des jeunes adultes vers la métropole ; elles font désormais partie des territoires les plus âgés de France ;
- la Guyane et Mayotte connaissent, à l’inverse, un dynamisme démographique exceptionnel, avec une fécondité élevée associée à une immigration importante de populations jeunes ; ce sont les deux régions les plus jeunes de France ;
- La Réunion, qui est de loin le Drom le plus peuplé, est dans une position intermédiaire.
Des politiques en direction des familles dans les Drom à aligner sur la métropole
Après un long cheminement de près de cinquante ans, les politiques sociales et familiales en direction des familles sont quasiment les mêmes dans les quatre Drom historiques et en métropole, à quelques différences près : le versement d’une allocation familiale au 1er enfant et l’absence d’une allocation pour les familles nombreuses à revenus modestes dans les Drom par rapport à la métropole.
En revanche, la situation de Mayotte reste beaucoup plus défavorable. Une partie des prestations versées en métropole ou dans les autres Drom y sont inexistantes ou sont servies avec des montants inférieurs et des conditions plus restrictives, bien que le niveau de vie y soit très bas.
Le HCFEA souligne d’abord que les politiques familiales et sociales ne peuvent, à elles seules, répondre aux difficultés que rencontrent les populations de ces territoires et recommande de lancer un plan d’investissement massif et durable dans l’éducation, la formation, le développement économique et le logement.
Le HCFEA fait ensuite plusieurs propositions pour améliorer la situation des familles des Drom :
- il recommande de verser les mêmes prestations familiales aux familles, quel que soit le territoire où elles habitent. En particulier, le complément familial versé dans les Drom devrait être destiné aux familles nombreuses modestes et aligné sur celui en vigueur en métropole.
- concernant Mayotte, le HCFEA recommande qu’un calendrier précis et ambitieux de convergence des prestations familiales avec la métropole et les autres Drom soit défini. Les prestations familiales qu’il conviendrait d’étendre en priorité à Mayotte sont l’allocation de base de la Paje, les allocations familiales pour trois enfants et plus et le complément familial sur le modèle métropolitain. Le HCFEA recommande plus globalement de faire rentrer Mayotte dans le droit commun.
- le HCFEA préconise de généraliser le service d’un véritable repas à l’ensemble des enfants scolarisés, principalement en Guyane et à Mayotte.
Les problèmes d’accès à la santé et à l’école des enfants à Mayotte et en Guyane
Malgré l’obligation de scolarisation à 3 ans (loi du 26 juillet 2019) et le renforcement de la prévention précoce en santé (dont examen de santé réalisé à l’école dans la 3e année), en Guyane et à Mayotte, une part importante d’enfants de moins de 6 ans n’a accès ni à l’école ni aux soins de santé dont l’école est un levier majeur. En cause, l’absence de services à proximité, des difficultés de transport spécifiques et la non-inscription à l’école de certains enfants de parents étrangers ou mineurs isolés.
Faute de services de PMI suffisamment dotés, de médecine scolaire et de repérages précoces, des pathologies de santé et santé mentale se développent davantage qu’en métropole. Par ailleurs, la mortalité infantile est très élevée, les grossesses adolescentes plus fréquentes et le suivi des grossesses insuffisant.
Face à cette situation, le HCFEA préconise de mettre en place des programmes pour lutter contre la non-scolarisation des enfants les plus précaires et la déscolarisation des adolescentes, qui renforce les risques de grossesses précoces. Il propose des mesures d’appui aux équipes de prévention et de suivi de la santé des enfants (PMI, périnatalité, santé scolaire) et la pérennisation des intervenants locaux formés. Il recommande par ailleurs de renforcer le traitement des données de santé et de scolarisation des enfants sur ces deux territoires.
Parallèlement aux actions de l’État et des collectivités, la société civile est très engagée localement. Pour répondre à la fois à l’urgence et au rattrapage progressif, le HCFEA recommande d’accentuer la mobilisation dans deux directions : celle de l’État, structurelle et à long terme, pour rendre effectives les obligations de scolarisation et de suivi médical, et la mobilisation, plus immédiate et multiple, de partenariats avec les acteurs locaux à travers leur renforcement, leur formation et la mutualisation des actions qui s’avèrent localement favorables.
Les politiques de soutien à l’autonomie des personnes âgées dans les Drom
Dans les Drom, les politiques de soutien à l’autonomie se distinguent par une situation domiciliaire de fait : la part de personnes âgées vulnérables en établissement y est faible. Le parc d’Ehpad n’a pas pour autant vocation à être fortement développé (surcoûts ; demande sociale), sauf dans des zones « blanches » et sur des besoins spécifiques. Il s’agit de développer des modèles « intermédiaires » et de rénover.
Le soutien à domicile se caractérise par des taux d’exécution des plans d’allocation personnalisée d’autonomie (APA) similaires à la situation métropolitaine. On retrouve les enjeux de structuration du lien sanitaire – médicosocial, et des besoins d’adaptation des logements. Mais l’enjeu de financement de ces politiques départementales est vif.
Réformer les financements du soutien à l’autonomie
Dans les Drom, la prise en charge de la perte d’autonomie est lourde (faible participation des allocataires à l’APA à domicile et nombre élevé de bénéficiaires d’une aide sociale). Compte-tenu des évolutions démographiques, elle sera difficilement soutenable : par rapport à 2018, les dépenses publiques d’APA en 2040 devraient être plus élevées de 208 % en Martinique, 243 % à la Guadeloupe et 246 % à La Réunion (168 % dans les départements métropolitains). Les Drom seraient concernés par le dispositif dit de bouclier (limitation du taux d’effort net à 30 %). Le HCFEA propose des pistes pour amorcer une réflexion plus large sur les conditions de financement de l’APA.
Le dossier complet :